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IDEXX SDMA

Cas clinique SDMA : Alex

Intérêt de la SDMA dans un bilan pré-opératoire

Patient :
Alex, chien Golden Retriever mâle de 12 ans.

Motif de la consultation :
Othématome à gauche.

Historique :
Othématome à droite 4 ans auparavant.

Examen clinique :
Alex est en bon état général, il est normotherme et normohydraté. Aucune perte de poids n’est rapportée. L’examen des appareils cardio-vasculaire et respiratoire ne montre aucune anomalie. Un othématome de 5cm est observé à gauche. Une otite est également mise en évidence du même côté. Un écouvillonnage de cette oreille est réalisé. L’examen cytologique révèle la présence de bactéries en forme de coques et de Malassezias.

Liste des anomalies :
Othématome de 5 cm à gauche secondaire à une otite.

Examens complémentaires

Une intervention chirurgicale et une vidange de l’othématome sont décidées. Un bilan pré-opératoire est proposé aux propriétaires. Compte-tenu de l’âge de l’animal, un bilan biologique large est préconisé afin de contrôler entre autres les fonctions rénale et hépatique, d’obtenir des valeurs de référence individuelles qui pourront servir de base pour le bilan post-op en cas de suspicion de complication ou pour les bilans annuels de santé ultérieurs.

Un bilan rénal complet est réalisé associant des tests fonctionnels (urée/créatinine, SDMA, densité urinaire) et lésionnels (UPC/ RPCU, bandelette urinaire).

La créatinine est dans les limites supérieures de l’intervalle de référence à 14,6 mg/L (VU : 5 – 15) alors que l’urée est nettement augmentée à 0,9 g/L (VU : 0,19 – 0,62). Le rapport Urée/Créat calculé de 28,76 ne permet pas d’orienter vers une composante pré-rénale évidente (car < 30).

 

La SDMA, quant à elle, est nettement augmentée à 30 μg/dL confirmant que le débit de filtration glomérulaire (DFG) est abaissé et donc que la fonction rénale semble altérée à ce stade. Les autres paramètres sanguins rénaux (calcium et phosphore) sont dans l’intervalle de référence. Il faut cependant noter que le phosphore est dans les limites supérieures de l’intervalle de référence. L’ionogramme révèle une hyperkaliémie à 6,3 mmol/L qui peut être expliquée par une diminution de son excrétion urinaire. Une hypoalbuminémie potentiellement liée à une fuite rénale est également mise en évidence. L’hypothèse d’une atteinte de la fonction rénale est alors évoquée.

Les paramètres hépatiques hors albumine (PAL, ALAT, GGT, bilirubine totale, cholestérol, ASAT) sont dans l’intervalle de référence. Une affection hépatique est donc peu probable.

La glycémie située dans les limites supérieures, associée à un dosage de fructosamine dans l’intervalle de référence, rend l’hypothèse d’un diabète sucré peu probable.

 

La numération et formule sanguine révèle la présence d’une anémie (hémoglobinémie à 10,2 g/dL) normocytaire normochrome arégénérative (43.600 réticulocytes). Un contrôle est recommandé afin de confirmer de manière définitive l’origine centrale de cette anémie. Elle pourrait être expliquée par un déficit en EPO notamment. Le reste de l’examen ne révèle aucune autre anomalie.

 

Analyse d’urine

DU : 1,022 donc la capacité de concentration des urines semble altérée conformément à ce qu’indiquait déjà la SDMA.

La plage protéines de la bandelette ainsi que le RPCU (rapport protéine/créatinine urinaire) supérieur à 0,5 (1,7 le jour de la consultation) permettent de mettre en évidence une protéinurie significative (DU basse). Afin de s’assurer de la persistance de cette dernière, un suivi devra être réalisé. D’après le consensus ACVIM, une protéinurie est considérée comme persistante si elle est mise en évidence à 3 occasions ou plus à 2 semaines d’intervalle. Une différence de > 40% entre 2 valeurs est considérée comme significative dans le cadre du suivi du RPCU. Le caractère pathologique de cette protéinurie est confirmé ici en l’absence de fièvre, d’exercice intense ou de crises convulsives. L’hypothèse de protéinurie pré-rénale ayant été en partie écartée (TP/NFS), on retient les causes de protéinuries rénales (glomérulaires, tubulaires) et post-rénales (inflammation, urolithiase, tumeur, infection). La réalisation d’un ECBU aurait pu permettre d’écarter un certain nombre de causes de protéinuries post-rénales. Les protéinuries glomérulaires peuvent, quant à elles, avoir plusieurs origines parmi lesquelles on peut citer des causes infectieuses (Lyme, pyélonéphrite, piroplasmose, leishmaniose, ehrlichiose, dirofilariose, septicémie, pyodermite, mycoplasmose), inflammatoires (MICI, pancréatite, cholangite, polyarthrite, lupus, maladies à médiation immune), endocriniennes (hyperadrénocorticisme), médicamenteuses (glucocorticoïdes, sulfamides/triméthoprime), tumorales (leucémie, lymphome, carcinomes, mastocytome, histiocytose maligne), familiales/congénitales (amyloïdose, néphrite héréditaire, glomérulonéphrite, glomérulosclérose, polykystose rénale). La présence d’une glucosurie était en faveur d’une tubulopathie. L’association d’une hypoalbuminémie, d’une protéinurie et d’une glucosurie orientent vers une atteinte glomérulaire et tubulaire. La réalisation d’examens d’imagerie, de tests de dépistage de maladies infectieuses ainsi que la mesure de la pression artérielle bien que préconisés ont été refusés par le propriétaire.

 

Diagnostic

Alex souffre probablement d’une maladie rénale chronique découverte fortuitement à l’occasion d’un bilan pré-opératoire d’othématome. Une atteinte mixte glomérulaire et tubulaire est suspectée.

 
Traitement et suivi

Un contrôle de la SDMA est préconisé afin de s’assurer de la persistance de la baisse du débit de filtration glomérulaire (DFG). Si la SDMA est stable à 30 μg/dL, Alex souffre d’une maladie rénale chronique. La classification IRIS peut alors être appliquée. D’après la créatininémie, Alex serait en stade 2 mais la SDMA étant supérieure à 25, la créatinine sous-évalue la situation. La mesure de la SDMA et le RPCU permettent de classer Alex en stade 3 protéinurique de maladie rénale chronique et donc d’appliquer les recommandations adaptées en matière de prise en charge. Un traitement de fond serait alors préconisé à ce stade avec une prise en charge nutritionnelle adaptée. L’objectif étant de réduire la protéinurie mais également de réduire la phosphatémie et de la maintenir en-dessous des 1,7 mmol/L en stade 3.

Rapports du patient

Bilan sanguin et urinaire

Aucune anomalie n’est relevée sur le bilan pancréatique.

Biochimie urinaire

Conformément au protocole DPS lorsque la SDMA est augmentée, une analyse d’urine complète est recommandée afin de réaliser un bilan lésionnel.

Discussion

Ce cas clinique illustre l’intérêt de réaliser un bilan pré-opératoire complet incluant la SDMA avant toute intervention chirurgicale. Dans le cas d’Alex, la créatininémie seule aurait sous-évalué le stade de la maladie rénale chronique. La SDMA a permis d’appliquer la prise en charge thérapeutique la plus adaptée au patient. Un suivi clinique et biologique rapproché doit être proposé aux propriétaires d’Alex. L’objectif étant de mettre en place le traitement de la maladie rénale chronique le plus précocement possible grâce à un diagnostic précoce pour allonger l’espérance de vie et conserver la qualité de vie du patient.

 
Conclusion

L’absence de signes cliniques évocateurs de maladie rénale ne doit pas justifier l’absence d’exploration par la réalisation d’un bilan pré-opératoire complet incluant la SDMA. Des découvertes fortuites peuvent survenir.

Télécharger le cas clinique de Alex

Dr Frédérique BERNAERTS

DMV, Dipl ECVIM, spécialiste en Médecine Interne
Centre Hospitalier Vétérinaire NORDVET
La Madeleine (59)

Dr Damien LEGROUX

DMV, CES de Biochimie et Hématologie
Cliniques Animales. DU d’hématologie
Laboratoire IDEXX


 

Références bibliographiques

  1. Nabity M.B.; Lees G.E.; Boggess M.M. et al. Symmetric dimethylarginine assay validation, stability, and evaluation as a marker for the early detection of chronic kidney disease in dogs. J. Vet. Intern. Med. 2015;29:1036-1044.
  2. Von Hendy-Willson V.E.; Pressler B.M. An overview of glomerular filtration rate testing in dogs and cats. Vet. J. 2011;188:156-165.
  3. Hall J.A.; Yerramilli M.; Obare E. et al. Relationship between lean body mass and serum renal biomarkers in healthy dogs. J. Vet. Intern. Med. 2015;29:808-814.
  4. Yerramilli M.; Yerramilli M.; Obare E. et al. Symmetric dimethylarginine (SDMA) increases earlier than serum creatinine in dogs with chronic kidney disease (CKD). [ACVIM Abstract NU-42]. J. Vet. Intern. Med. 2014;28:1084-1085.